Interview de Monte A. Melnick, Sur la Route avec les Ramones, par Sylvain Nicolino, Obskure.com, janvier 2013

Sur la route avec les Ramones, Monte A. Menick + Frank Meyer, couverture © Jon Holmstrom

SUR LA ROUTE AVEC LES RAMONES
MONTE A. MELNICK + FRANK MEYER

Interview de MONTE A. MELNICK par Sylvain Nicolino
OBSKURE MAGAZINE, 8 janvier 2013

Quand l’Éditeur Rytrut m’a proposé un entretien avec Monte A. Melnick, le cinquième Ramone, manager du groupe présent des débuts jusqu’au dernier concert à Los Angeles, j’ai sauté sur l’occasion de poser quelques questions avec ce témoin privilégié.

Les réponses, laconiques, arrivent le jour-même. Ces Américains ne dorment-ils pas ? À la fin du mail, Monte m’encourage même à lui poser d’autres questions… Chiche ? Voici le résultat !

Sylvaïn Nicolino pour Obsküre Magazine : Combien de temps ça vous a pris avec Franck Meyer pour discuter et ensuite pour terminer ce livre, Sur la Route avec les Ramones ?

Monte A. Melnick : Franck et moi, nous avons travaillé un an environ sur le livre en parlant à plein plein de personnes qui ont fait partie du monde des Ramones.

Et que leur disiez-vous en les approchant ? Un nouveau livre sur les Ramones ? Quel était l’objectif principal de votre travail au départ ?

Personne n’était surpris que je mette à écrire un livre. Tous les gens étaient très contents de venir me parler. Le but principal de ce livre, c’est de donner un coup d’œil assez long sur les gens qui travaillaient dans et autour du groupe. Je raconte l’histoire des Ramones du point de vue d’un Tour Manager.

Est-ce que ça a été douloureux d’exhumer le passé ? Comment as-tu négocié tous ces souvenirs ?

C’était plus une expérience cathartique pour moi de faire ce bouquin. Voir enfin imprimé ce que j’avais vécu m’a vraiment fait du bien. Je pense aussi que mon histoire, mon point de vue a son importance du fait que j’étais présent du début de la carrière des Ramones jusqu’à la tout fin.

D’une certaine façon, je place ton livre en parallèle avec celui de Henry Rollins, Get in the Van. C’est aussi une histoire basée sur la vérité et la passion. Là, on a la réalité crue du métier de manager. En as-tu parlé avec d’autres managers pour avoir leurs opinions sur ce travail ? En as-tu rencontré durant la longue route passée avec les Ramones ?

Oui, j’ai rencontré plein de gens du monde de la musique durant toutes ces années. Dans mon livre je ne mentionne que certains d’entre eux.

J’ai l’impression de sentir comme une certaine déception au sujet de ce que Dee Dee a pu raconter dans son livre, sur ces propos concernant ton implication dans sa dépendance. Savoir tirer un trait sur ce genre de choses, est-ce la marque des gens les plus nobles ?

C’est plus simple : Dee Dee était un grand conteur… La plupart des anecdotes de ses livres sont des histoires réinventées, présentant les faits en sa faveur. Comme j’ai connu Dee Dee de très près, cela ne m’affecte pas, en fait.

Je comprends, mais est-ce que ce n’était pas dur de devoir expliquer à ta famille ou à tes amis que ce qu’il écrivait n’était pas exact ? Je ne cherche pas que tu te lances dans des polémiques, c’est juste un truc qui m’a suivi durant la lecture du livre, un certain manque de reconnaissance pour le travail effectué.

J’expliquais aux gens comment fonctionnait Dee Dee, les autres savait déjà qui il était et son mode d’action.

Et qui sont ces Sam et Al auxquels tu envoies régulièrement des cartes postales lors des tournées ? De nombreuses sont reproduites dans le livre…

Al a travaillé très tôt pour les Ramones comme roadie et Sam était un ami. Nous partagions tous une maison dans New York. Quand je partais en tournée avec les Ramones, je leur envoyais une carte du pays. Et du coup, je pouvais toutes les récupérer quand je revenais à la maison à la fin de la tournée.

Mais comment cela a-t-il été possible pour toi de construire une vie familiale pendant toutes ces années ?

C’est vraiment ça qui a été le plus gros problème. Voyager sans cesse ne va pas facilement avec une vie de famille. Il faut réellement avoir une famille très compréhensive qui arrive à accepter le fait que tu sois absent la majeure partie de l’année.

En parlant de famille, métaphoriquement, tu te vois plus comme le père ou la mère dans cette « Ramones family » ?

Le métier de Tour Manager recouvre beaucoup beaucoup d’aspects. Je ne devais pas simplement m’occuper d’un groupe de fous, mais je devais aussi travailler avec une équipe de dingues, d’autres managers, des labels, des promoteurs, les petites amies des uns et des autres, etc. C’était un vrai défi et un travail vraiment stressant, mais ça avait aussi plein d’aspects positifs, comme tous ces voyages avec la possibilité de découvrir le monde.

Tu ne réponds pas sur l’aspect psychologique du métier. Te sentais-tu comme un parent pour ces grands gamins ? Ou est-ce que tu te voyais comme un grand-frère ou un copain d’un type un peu spécial ? Il me semble à lire le livre que ton statut de cinquième Ramones est même en-deçà de la réalité. Il n’y a pas que les musiciens, sans toi, le groupe aurait splitté, non ?

Oui, c’est un peu tout ce que tu dis. Pour certains des quatre, j’étais un bon ami, pour d’autres, ça n’a pas dépassé la relation de travail.

Et aujourd’hui, où vis-tu ? Que penses-tu du fait que le dernier concert des Ramones ait eu lieu à Los Angeles et pas à New York ?

Je suis né à New York, j’ai grandi à New York et je vis encore à New York. Je pense que le dernier concert des Ramones aurait dû se dérouler à New York, mais Johnny vivait à Los Angeles au moment de la dernière tournée et il ne voulait vraiment pas revenir à New York pour y donner un concert.

Et que penses-tu de cette fermeture du CBGB ?

Tu sais, le CBGB original n’existe plus, il a été remplacé par une boutique de fringues de luxe Il y a quelques personnes qui songent à le ré-ouvrir dans un nouveau lieu, en respectant ce que ça a été. Ceci me semble une bonne idée.

Qu’as-tu aimé dans le travail de l’Éditeur français ?

Travailler avec Rytrut a été un vrai plaisir, ils ont su poser beaucoup de questions pour éclaircir le moindre problème de traduction rencontré en passant de l’anglais au français.

As-tu une anecdote sur ce culte qui entoure les Ramones depuis leur mort ? Pas que des histoires de fashionistas qui achètent des T-Shirts ou une étude du prix croissant des baskets Converse ?

C’est vrai que ça me surprend carrément de voir à quel point les Ramones sont devenus célèbres aujourd’hui. Ce sont des icônes du rock. Je dis souvent que si les Ramones avait été aussi célèbres lorsque je travaillais pour eux, j’aurais touché une putain d’augmentation ! »