Chronique du dernier concert de Nirvana en France, par Ladzi Galaï

Nirvana Buzzcocks 72IMPRESSIONS DU DERNIER CONCERT DE NIRVANA EN FRANCE

Ladzi Galaï était au concert de Nirvana, au Summun de Grenoble, France, le 18 février 1994 (billet 2290), il raconte :

« Nous étions loin d’imaginer tout ce qu’il y avait derrière. J’y suis allé avec ma sœur, Christine, maintenant la présidente de Rytrut. En arrivant, on a pas eu à faire la queue car presque tout le monde était déjà entré. Et il y a déjà du son qui vient de la scène. En passant les portes, je demande à un videur : « Ça a déjà commencé ? » Il me répond : « Ça vient juste de démarrer, c’est pas grave, c’est la première partie. » Je réplique : « La première partie, ouais, mais c’est les Buzzcocks, un super groupe, que Nirvana ont écoutés ! » Il n’y a déjà presque plus personne devant le bar, on fonce direct dans la salle, au trois quart de la fosse, un bon endroit pour le son. Et on aurait eu du mal à aller plus prêt, c’est bondé. »

« Je suis ravi de voir enfin les Buzzcocks. Ils envoient un bon set avec leurs classiques qui ont bercé ma jeunesse et des morceaux récents. J’avais acheté leur premier album, Another Music in Another Kitchen, à Londres début 1979, alors en Angleterre pour un échange inter-scolaire. Sentant que la pression monte dans le public qui attend Nirvana avec impatience – ne connaissant certainement pas pour beaucoup, vu le monde, ce groupe qui n’est ‘que’ le groupe d’ouverture – Pete Shelley et sa bande terminent leur set en queue-de-poisson. Arrêtant de jouer les uns après les autres sur le dernier morceau, I Believe, avec sa dernière phrase répétée en boucle : ‘There is no love in this world anymore’. Ils balancent simplement leurs instruments sur scène et des éléments de batterie commencent à gicler. Il ne reste plus que le batteur que rien n’arrête. Il continue le beat un moment tout seul puis s’en va en faisant valdinguer la batterie… un avant goût de Nirvana ? »

« Nous allons prendre une bière et revenons dans la place. L’euphorie est à son comble. Je n’ai pas encore entendu le dernier album de Nirvana, In Utrero. C’est un régal de le découvrir sur scène. Je les avais connus avec Bleach, bien avant leur succès planétaire de Nevermind, lors d’une commande faite à Subterranean Records, je pense. Le concert est magnifique, il y a aussi une contrebassiste, Elora Creager, qui joue sur deux morceaux, c’est envoûtant. Pat Smear est à la seconde guitare. Très content de le voir en vrai, car fan des Germs et de quelques autres de ses élucubrations. Aussi, ça m’a fait drôle et a ravivé des souvenirs de voir Dave Grohl à la batterie. (Il était en effet déjà venu à Grenoble en 1988, avec Scream qui ont joué au Magic de Fontaine devant une vingtaine de personne, mais ont envoyé un set de fous, terminant avec des reprises en inter-changeant les instruments. Et cela pendant plus de deux heures. Dave avait pris la basse sur la fin. J’avais échangé quelques mots avec le chanteur, Peter Stahl, après au bar, très sympa. Ce concert était organisé par le disquaire Bunker). Revenons au concert de Nirvana. Il y a une magie qui s’opère, des briquets qui s’allument, des morceaux pop et des morceaux qui arrachent. Kurt paraît maigre et fébrile, mais il assure le concert parfaitement, ainsi que tout le groupe. C’est captivant. Pas de final apocalyptique, ça se termine avec l’ambiance mi-feutrée de Heart-Shaped Box. J’ai été subjugué par le son, un son énorme et propre, auquel nous n’étions pas habitué dans cette salle difficile à sonoriser, la basse ayant tendance à couvrir le chant, le rendant parfois difficile à suivre. Mais là, bon équilibre, un son limpide et puissant. A noter aussi un jeu de lumière exceptionnel. Franchement, je n’avais encore jamais vu un éclairage aussi créatif à un concert rock. Des effets de lumières différents pour chaque morceau, même plusieurs, jouant avec les ambiances bigarrées de leur musique. Nous en sommes sortis ravis. Qui aurait pensé que ce serait l’un des derniers concert de ce groupe ayant en quelque sorte popularisé le punk à grande échelle ? »

 – Ladzi Galaï, hiver 2014

Pour (ré)-écouter le concert :